Si personne aujourd’hui ne nie l’avancée incontestable du legs du Conseil National de la Résistance, nul ne se prévaut pour autant de l’héritage que constitue la création de la sécurité sociale. Sur fond de crise sociale et économique, droite comme gauche tentent de trouver des solutions, mais une question demeure : à quel prix ?
Longtemps dans l’opposition, nous avons déploré la déconstruction progressive de la solidarité nationale, opérée par le droite depuis dix ans et accélérée sous le précédent quinquennat. De l’aide médicale d’état aux retraites en passant par les déremboursements et les franchises, la droite au pouvoir a progressivement fait sauter les digues qui contenaient l’effort collectif au profit des plus vulnérables. Au-delà des actes, c’est l’esprit même qui a animé la mise en œuvre de la solidarité nationale qui fût remis en cause. En matière de santé, notre sécurité sociale permet à chacun de cotiser en fonction de ses moyens et de recevoir en fonction de ses besoins. C’est cette règle qui fait de notre système de protection sociale l’un des meilleurs du monde selon l’Organisation Mondiale de la Santé. Les plus démunis bénéficient d’aides appropriées comme la Couverture Médicale Universelle, grande avancée des années Jospin et bouclier indispensable pour permettre à chacun de se soigner convenablement.
La succession d’actes politiques témoignant du désengagement progressif de l’état en matière de santé fait craindre le pire pour les années à venir. Principal pôle de développement d’un pays, la santé est une donnée incontournable en matière d’amélioration des conditions de vie d’une population. Vivre mieux et plus longtemps en bonne santé est certes une avancée humaine, mais au-delà de l’approche conceptuelle, c’est avant tout une économie non négligeable permise à la sécurité sociale. Car au final, c’est là le nerf de la guerre : l’argent. La démographie, le vieillissement de la population, les progrès de la médecine, la médicalisation croissante sont autant de paramètre venant alourdir la facture et qui, cumulés à la non progression (voir la baisse) des cotisations du fait du chômage ont abouti à un déficit croissant depuis de nombreuses années.
Les gouvernements successifs ont tenté d’y remédier, et l’amélioration observée lorsque Lionel Jospin était premier ministre a vite été effacée par le passage de la droite. De nombreuses mesures ont été adoptées et ont progressivement égrené la solidarité nationale : franchises médicales, convergence des tarifs pour les hôpitaux publics et les cliniques privées, gel des enveloppes destinées au « social » pour les hôpitaux, déremboursements, forfait hospitalier, ticket d’entrée pour l’AME ou encore refus de régulation des dépassements d’honoraires sont autant d’éléments qui ont fait de la santé un luxe et du renoncement aux soins un adage pour de nombreux concitoyens.
Le déficit abyssal de la sécurité sociale n’est donc pas de bon augure pour la suite. Mais ça, c’était avant la victoire de la gauche. Cette gauche engagée, cette gauche critique, cette gauche prometteuse qui a dénoncé sans relâche dans l’opposition et qui a suscité d’énormes attentes après son arrivée au pouvoir. Nous sommes tous dans l’attente de signaux forts envoyés à tous ceux qui ont cru que l’attachement viscéral de la gauche à l’héritage du Conseil National de la Résistance changerait la donne.
Mais voilà… la crise est là et les choix opérés ne vont pas forcément dans le sens de la solidarité. Ce qui était attendu c’était une volonté. Une volonté farouche de maintenir la solidarité, de supprimer les injustices mises en place par la droite et de montrer que l’égalité réelle n’est pas un simple concept mais une vraie philosophie. Certes il est encore tôt, la première année n’est même pas encore écoulée mais les plus faibles n’attendent pas et les chantiers sont énormes : prise en charge de la toxicomanie, amélioration de l’accès aux soins, réorganisation du système de soins, lutte contre l’exclusion, amélioration de la prise en charge des maladies chroniques ; la liste est longue et les espoirs impatients.
Mais ce combat est juste et indispensable pour permettre à chacun de trouver sa place dans la société et pour préserver coûte que coûte l’esprit : la nécessité de solidarité, pour tous.
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