Le premier anniversaire de l’élection de François Hollande est l’occasion d’un bilan qui a déjà été tiré en réalité très vite après l’arrivée de la gauche au pouvoir car si la volonté d’en finir avec les années Sarkozy était réelle, si la droite était usée et fatiguée, le scepticisme dans le pays était tel qu’on savait que la gauche ne ferait pas de miracles. Tout au plus lui accordait-on l’occasion d’essayer.
Pour évaluer le bilan de la première année de gouvernement, il ne suffit pas de mettre en parallèle les promesses de campagne et les réalisations. Cela aurait du suffire, mais dans bien des cas, tout est question d’interprétation.
On le sait, le pouvoir isole. Y compris de ses propres amis. Ce qu’on sait aussi c’est que pour concéder un succès à la gauche, il faut lui reconnaître qu’elle a raison, or sans tomber dans la facilité de « la faute aux médias », il faut admettre que les « commentateurs » et la presse sont tellement jaloux de leur indépendance ou de leur objectivité qu’ils sont subjectifs. Ils sont « distanciés » au point d’en être incohérents et plusieurs se retrouvent, malgré eux sont au service du doute plus que de la vérité.
C’est la même chose pour une partie de « l’opinion ». Ces personnes éduquées, dont certaines ont même fait des études de d’histoire, de science politique, sociologie ou de philosophie, mais qui affectent d’être « fermées » au point d’être incapables d’analyser des processus politiques qu’elles savent complexes. Il est tellement facile de décréter qu’on a été trahi et que tous les politiques sont des menteurs !
Si l’opinion n’accord aucun droit à l’erreur aux dirigeants politiques, il faut mesurer combien elle peut être elle-même versatile. Et en ces temps difficiles, ce que demande légitimement le peuple pour une sortie durable de la crise, pour changer le monde, nécessite des réformes difficiles et dont le résultat ne peut être visible tout de suite.
La moitié des engagements de campagne ont été tenus en un an. Il reste quatre ans pour honorer l’autre moitié. On nous dira que tenir des promesses sans que celles-ci se voient n’est pas utile, le changement ne peut se réaliser en surface. La gauche se fourvoierait et tromperait le pays si elle se contentait de donner l’apparence du changement alors que tout le monde s’accorde pour dire qu’il faut faire les choses en profondeur.
Ce qui manque à François Hollande par rapport à ses prédécesseurs ? Des soutiens dans l’opinion. Rarement une victoire politique fut acquise à contre courant des grandes tendances en France comme en Europe. « Ils » ne nous font pas de cadeau qu’ils soient à droite car ils n’aiment pas la gauche, ou à gauche car ils se souviennent des reniements passés.
Voilà pourquoi c’est dur. Les socialistes sont seuls, leurs marges de manœuvre réduites car une bonne partie des politiques nationales dépend d’un contexte européen qui est lui aussi défavorable.
Sur le front européen, la gauche essaye d’organiser un rapport de force pour inverser le cours des choses. C’est donc une bataille sur deux fronts qu’il faut livrer.
Parler d’échec de François Hollande un an à peine après son élection est le moyen de rattraper par la bataille de l’opinion ce qu’on a perdu dans la bataille des urnes.
Face à cela, ce discours qui est martelé sur « le changement de cap », il faut tenir le rythme, mais entendre l’impatience du pays. Quand on parle un peu pompeusement de « pédagogie », on avoue la faiblesse du lien entre le parti et une opinion volatile.
Hollande à la différence de ses prédécesseurs, évite les effets d'annonce et les formules placebo, mais il faut reconnaître que l'espace est étroit entre la droite qui parie sur l'échec de la gauche et la gauche de la gauche qui doute des capacités de réussite de la gauche de gouvernement. C'est tout le problème.
Une des conditions de la réussite ne sera donc pas simplement le fait d'avoir tenu les promesses, mais ce sera aussi le fait d'avoir obtenu les résultats escomptés et d'avoir réussi à convertir l'ensemble de la gauche à une culture de gouvernement dans laquelle le réalisme n'est pas un renoncement.
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