Dieudonné avait dit d’elle que la comparer à un chimpanzé était dur pour les chimpanzés. Christiane Taubira qui a plus fait pour que la mémoire de la traite négrière soit ravivée en France que le père des filleuls de Le Pen publie dans le Huff un petit texte sur le cas Dieudonné. A lire sans modération.
Au-delà de la « querelle sur la quenelle », il y a sans aucun doute un moment d’obscurantisme. La souffrance et l’ignorance ont toujours fait mauvais ménage dans l’Histoire. C’est ce couple infernal qui a causé de grands malheurs. De tous temps, les dirigeants politiques et religieux ont détourné le ressentiment des peuples qu’ils opprimaient vers d’autres cibles. Cela a donné l’Inquisition, les dragonnades, les pogroms.
Le repli identitaire se fait toujours par le rejet tôt ou tard de l’Autre.
L’ignorance ne touche pas seulement les gens peu cultivés, proies faciles des démagogues. Elle touche aussi ceux qui croient savoir, mais qui se contentent de commenter, persuadés qu’il faut qu’ils parlent, même s’ils n’ont rien à dire.
Le cas de l’ex animateur fédéral du MJS des Pyrénées orientales qui fut sanctionné pour avoir soutenu Dieudonné et critiqué la décision du ministre de l'Intérieur Manuel Valls est intéressant. Il ne s’agit ni d’accabler ce jeune militant ni d’imputer sa faute au Mouvement des Jeunes socialistes. Le vieux parti socialiste n’est pas, si on ose dire « tout blanc ». Les déclarations inappropriées de Manuel Valls sur les Roms resteront longtemps comme une tâche sombre. Mais quand même.
Depuis l’irruption des réseaux sociaux dans le champ politique, l’expression publique est de moins en moins calculée, réfléchie, pesée. Il s’agit de s’empresser de parler pour être remarqué et, consécration suprême, mais éphémère, d’espéré être repris. C’est le moyen pour des anonymes de communier dans un espace virtuel dans lequel on cohabite avec des journalistes et des personnalités politiques.
Un tweet détruit plus une réputation qu'il ne crée de la notoriété. En tout cas, on est zappé aussi vite qu’on zappe soi-même les sujets d’actualité.
Personne n’imagine qu’une organisation politique, même centralisée comme le Parti de gauche par exemple, soit en mesure de retenir les doigts de ses twittos. Le voudrait-elle qu’elle en serait impossible et on trouvera toujours la voix au PS, à l’UMP ou ailleurs qui confirmera la caricature.
De même qu’il est irresponsable pour un militant socialiste d’insulter Le Pen sur sa personne, il est stupide de se faire en un tweet l’avocat d’un homme difficilement défendable. Pas de moyen de faire dans la nuance en 125 signes.
Mais dans une organisation de jeunesse, au cœur des préoccupations de jeunes des quartiers populaires qui croient sincèrement qu’on peut « niquer le système », déplorer que Dieudonné soit bâillonné, soutenir la cause palestinienne sans pour autant être antisémite – cette combinaison de base est possible jusqu’à un certain point, cela mérite bien en plus d’un débat, une stratégie d’action politique. C’est un peu comme eux qui portaient des casquettes frappées du « X » il y a un peu plus de vingt ans au moment de la sortie du Malcolm X de Spike Lee.
Les organisations politiques, associatives ou syndicales, ne doivent jamais renoncer à leur rôle de mouvements d’éducation politique. Ce combat toujours central contre l’injustice ne peut triompher sans un combat contre l’indifférencation.
La gauche ne doit pas craindre de faire de la pub au FN ou à Dieudonné en démontant leur discours et à côté de la sanction qui doit tomber quand la loi est enfreinte, le travail d’éducation est indispensable.
Il faut expliquer pourquoi il y a confusion et ce qui est mal.
On rétorquera que les gens sont assez grands pour s’informer eux-mêmes et que « le système » formate les gens. Peut-être faut-il parfois lever le nez de son écran, sortir, lire de bons livres, parler aux gens, surtout ceux qu’on ne connaît pas. Des fois ça aide réel…
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