Le limogeage de Delphine Batho en quelques heures ne ravit personne. Certains sont frappés par la brutalité de la décision et de la rapidité avec laquelle elle fut prise - qui contraste avec d'autres choix que certains auraient aimé aussi nets sur d'autres sujets, d'autres considèrent que la doctrine Chevènement est toujours d'actualité : "un ministre ça ferme sa gueule ou sa démissionne" une manière moins élégante de dire "se soumettre ou se démettre ".
Couac de trop ? Charge injuste contre un budget trop juste ? Cible facile parce que ministre de peu de poids par rapport aux grandes gueules qui se sont empaillées ces derniers moins sans que la moindre sanction ne les frappe ? A-t-elle été sacrifiée pour l'exemple ? Le temps le dira...
Ce qui nous intéresse c'est cette notion de discipline, un mot rare dans le vocabulaire de la gauche, qu'on remplace volontiers par "responsabilité" ou "sérieux"...
Cette éviction d'une ministre vient après les frondes de jeunes députés de l'aile gauche du PS qui en sont à leur premier mandat et qui courroucent leurs aînés qui s'agacent qu'on confonde un hémicycle avec un amphi, un groupe parlementaire avec une coordination étudiante...
L'expression publique achève d'énerver ceux qui voudraient une "parole maîtrisée". Que faire pour que ce ne soit pas la pagaille dans les rangs sans donner le sentiment du caporalisme dont l'inefficacité n'est plus à démontrer ?
Question difficile quand on sait que "la discipline de parti" ne se pratique plus guère que dans les votes dans les assemblées. On se souvient tous qu'en 2004-2005, le PS n'avait pas pu empêcher une campagne du "non" au Traité constitutionnel menée par des socialistes qui, sachant ce qu'ils faisaient, défièrent un François Hollande alors impuissant.
Dans les traditions travaillistes ou social-démocrates, on aurait déjà mis au ban du groupe parlementaires ces petits dissipés.
Ce que les Anciens appelaient auctoritas garde un sens de nos jours. Quiconque a de l'autorité n'a pas besoin de l'exercer, car à défaut d'être craint.
Cela n'a rien à voir avec la liberté de parler. Tout est une question de cadre. Personne ne doute que la parole soit libre dans un groupe parlementaire ou dans un gouvernement. Mais dans l'espace public, le contexte n'est plus le même et on ne peut opposer sa liberté de parole à la nécessité de présenter un front cohérent face à l'adversaire ou une position lisible face à l'opinion.
S'il faut se battre de toutes ses forces pour faire pencher de son côté l'orientation de l'organisation à laquelle on appartient, il est tout aussi normal que par son expression on ne brouille pas le message...
Mais ce qui est aussi en question, c'est la capacité d'écoute et de prise en compte toujours plus importante des avis divergents qui, il est vrai ne sont jamais assez considérés !
N'oublions jamais que le mot même de "discipline" vient du même mot qui signifie "apprendre".